Quelles sont les émotions ? Savoir identifier tes émotions est une super compétence. En effet, apprendre à les nommer et les distinguer est le b.a.-ba si tu souhaites apprendre à les gérer et à mieux vivre avec. Autrement dit, identifier ses émotions est à la base de la régulation émotionnelle.
Dans cet article, je te propose un tour d’horizon simple des grandes théories autour des émotions. Objectif ? Mieux comprendre de quoi on parle, et enrichir ton vocabulaire pour t’aider à mieux cerner tes émotions et celles des autres.
Au programme :
- Définition d’une émotion
- Quelles sont les émotions ?
- Les 6 émotions primaires de Ekman
- La roue des émotions de Plutchik
- Les 27 émotions de Cowen et Keltner
- Les émotions positives de Fredrickson
Temps de lecture : 13 minutes 🕦
Définition d’une émotion
Avant de préciser quelles sont les émotions, définissons ce qu’est une émotion. La définition qui va suivre est celle donnée par Christophe André, psychiatre et psychothérapeute qui fait un travail remarquable pour aider les gens à mieux vivre avec leurs émotions.
Dans une masterclass intitulée “Les clés pour gérer ses émotions”, il définit une émotion comme étant une réaction à des événements (ou stimuli) extérieurs et intérieurs.
Cette réaction a 3 caractéristiques principales.
Elle est :
- automatique
- à la fois psychique et physique
- adaptative
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L’émotion est une réaction automatique
L’émotion est automatique : cela sous-entend que tu ne peux pas empêcher sa manifestation.
De l’intérêt donc d’apprendre à les gérer pour éviter que les émotions désagréables deviennent envahissantes et aient, par conséquent, un impact négatif à plus ou moins long terme sur ton corps et ton esprit (cf. les maladies psychosomatiques ci-après).
A noter que si personne ne peut empêcher une émotion, on est tous capable de développer plus ou moins consciemment des mécanismes de défense pour réprimer ces émotions. Autrement dit, on peut être dans le déni, c’est-à-dire être inconscient de nos émotions à certains moments (ou de manière chronique). Cela ne veut pas dire qu’elles n’existent pas !
L’émotion est une réaction psychique et physique
L’émotion se traduit dans ton esprit mais aussi dans ton corps. Par exemple, la peur s’accompagne de différentes manifestations physiques comme des palpitations cardiaques, une respiration qui s’accélère ou encore des tremblements.
C’est important de souligner l’aspect physique des émotions car une émotion désagréable qui n’est pas “digérée” va continuer de se manifester dans ton corps. Sur le moyen et long terme, cela peut avoir des répercussions néfastes : c’est ce qu’on appelle les maladies psychosomatiques (troubles cardiovasculaires, migraines, insomnies, etc.). Dans ce cas, le mal-être psychique est tel qu’il en devient physique.
Si cela t’intéresse, je te conseille de jeter un œil à la cartographie des émotions dans le corps élaborée dans le cadre d’une étude finlandaise.
L’émotion est une réaction adaptative
L’émotion a une raison d’être, celle de t’aider à :
- survivre
- t’adapter à ton environnement
- évoluer
Prenons quelques exemples pour illustrer chaque terme : survivre, s’adapter, évoluer.
Exemple 1 : l’émotion qui permet de survivre
Admettons que tu randonnes en pleine forêt. Assez rapidement le vent tourne : tu sens l’orage venir. Et puis tu prends conscience que le soleil va se coucher d’ici peu de temps. Tu ressens alors de l’appréhension, et cette émotion te signale le besoin de te mettre en sécurité. Tu décides alors de rebrousser chemin pour ne pas te retrouver en forêt la nuit, sous la pluie et prendre le risque de ne plus retrouver ton chemin. Question de survie…

Exemple 2 : l’émotion qui t’aide à t’adapter
Imaginons que tu es manager d’une équipe de 4 personnes et vous présentez les résultats de vos projets au président de l’entreprise.
Tu sais que ton équipe a travaillé dur même si les résultats ne sont pas toujours au rendez-vous. Pour autant, tu connais leur motivation, et sais qu’avec plus de temps et de moyens ton équipe fera mieux la prochaine fois. Mais le président ne l’entend pas de cette oreille…
Désagréable (et maladroit), il ne fait que relever les mauvais résultats de l’équipe. Tu ressens à ce moment là de la colère suite à ses remarques injustes, mais aussi de l’appréhension car tu vois les membres de ton équipe se décourager au fur et à mesure de la réunion…
Or, la réussite du projet dépend de leur motivation. En tant que manager, tu décides alors de faire une blague pour détendre dans un premier temps l’atmosphère et ainsi capter l’attention de ce président pas très commode ; et tu en profites pour souligner que les résultats dépendent en bonne partie du temps et des moyens alloués à l’équipe. Tu lui indique alors la nécessité d’allouer plus de budget pour se donner “les moyens des ambitions”.
Bref, à ce moment là, la peur de voir ton équipe se démotiver et la colère face aux propos peu nuancés du président ainsi qu’au manque de moyens t’ont poussé agir et à t’adapter à la situation en prenant en compte le comportement des différentes personnes présentes pour en tirer le meilleur parti !
Exemple 3 : l’émotion qui te permet d’évoluer
Dernier exemple pour illustrer en quoi l’émotion est aussi une boussole pour t’aider à évoluer.
Imagines que tu sois profondément triste suite à une nouvelle rupture amoureuse. Cette émotion te pousse au repli sur soi et l’introspection.
Elle s’exprime car tu dois faire le deuil d’une nouvelle relation… mais surtout, et c’est là que la sagesse de l’émotion s’exprime, elle t’indique que tu dois faire le deuil plus largement de comportements handicapants dans ta vie sentimentale. Tu t’interroges : “Pourquoi suis-je toujours attiré(e) par des personnes qui ne sont pas disponibles émotionnellement et dont le comportement finit toujours par me blesser ?”.
Dans un éclair de lucidité, tu prends conscience qu’il est temps d’arrêter de perdre ton temps auprès de personnes qui ne te considèrent pas à la hauteur de ton énergie et de ton amour… Ou bien tu décides de faire une psychothérapie pour comprendre et te débarrasser une bonne fois pour toute de ces comportements handicapants ! L’émotion sert aussi à ça : te faire voir les choses sous un nouvel angle et t’encourager à changer en profondeur les choses.
Mémo 📌
L’étymologie du mot “émotion” donne sa raison d’être. En latin, “émotion” vient de “emovere” qui signifie “mettre en mouvement”. Les chercheurs parlent eux de “la tendance à l’action” des émotions. Un moyen de rappeler que les émotions, quand on prend le temps de les ressentir et de les écouter, sont nos alliés car elles nous poussent à agir…
Quelles sont les émotions ?
Dans cette partie, je ne donne pas un panorama exhaustif des théories sur les émotions mais plutôt un aperçu simple des théories qui ont retenu mon attention en indiquant pour chacune d’elle l’intérêt que j’y vois.
Les 6 émotions primaires d’Ekman
Paul Ekman fut l’un des pionniers dans l’étude des émotions. Dans les années 70, ce psychologue américain a établi une liste des 6 émotions “primaires” :
- La tristesse
- La joie
- La colère
- La peur
- Le dégoût
- La surprise
Pourquoi ces émotions sont dites primaires ? Selon lui, ces émotions sont universelles.
Pour établir cette liste, il a effectué des recherches auprès d’une tribu de Papouasie-Nouvelle-Guinée, isolée du monde. Son travail a permis de mettre en évidence le fait que les expressions du visage associées à ces 6 émotions étaient reconnues de manière similaire par des personnes de cultures différentes, tant celles du monde occidental que celles isolées de Papouasie-Nouvelle-Guinée.
A chaque émotion, sa fonction !
Connaître la fonction des émotions permet de mieux comprendre tes besoins et ainsi de prendre des décisions plus éclairées.
Par exemple, la tristesse signale un besoin de changement et de renouveau face à la perte de quelque chose ou d’un être cher. Quand elle est exprimée, elle signale aux autres un besoin d’être rassuré, réconforté ou encore aidé.
Selon moi, l’intérêt de la théorie des 6 émotions primaires réside dans sa simplicité. Elle permet de faire un premier pas dans la compréhension de nos émotions. Toutefois, si on veut mieux comprendre notre monde intérieur, il est nécessaire d’enrichir son vocabulaire émotionnel. De l’intérêt donc des théories suivantes…
La roue des émotions de Plutchik
Dans les années 80, Robert Plutchik, un autre psychologue américain, propose un modèle de classification des émotions sous forme de roue. C’est un outil pratique pour enrichir son vocabulaire et mettre des mots sur ce qu’on ressent.

Plutchik considère qu’il y a 8 émotions de base que sont la joie, la peur, le dégoût, la colère, la tristesse, la surprise, la confiance et l’anticipation.
Chaque émotion peut varier en intensité : c’est ce qui est représenté par les nuances de couleur. Ainsi, la joie varie, allant de la sérénité (basse intensité) à l’extase (haute intensité). Enfin, les émotions de base peuvent se combiner pour donner des émotions dites secondaires. A titre d’exemple, l’amour (émotion secondaire) est une combinaison des deux émotions fondamentales que sont la joie et la confiance.
Selon moi, cette représentation sous forme de roue a le triple avantage de faciliter la mémorisation des émotions, de mettre en avant la notion d’intensité émotionnelle, tout en donnant à voir la complexité de l’expression émotionnelle avec cette notion de mélange. Plutchik parle de “dyade” pour parler des combinaisons d’émotions. Sans entrer ici dans le détails, ce concept de dyade est intéressant car il fait prendre notamment conscience des contradictions qui vivent parfois (souvent) en nous… Un exemple : selon Plutchik, la combinaison de la joie et de la peur donne la culpabilité ; celle de la confiance et de la peur donne la soumission, etc.
Les 27 émotions de Cowen et Keltner
Beaucoup plus récemment (2017), une étude menée par Alan Cowen et Dacher Keltner a révélé 27 grandes catégories d’émotions bousculant ainsi les théories historiques d’Ekman et de Plutchik selon lesquelles la plupart des expériences émotionnelles relèvent d’une poignée d’émotions primaires.
Dans le cadre de leur étude, Cowen et Keltner ont soumis 2000 vidéos à plus de 800 hommes et femmes. Les participants devaient ensuite décrire leur réponse émotionnelle.
L’analyse des données des questionnaires a permis d’identifier les 27 grandes catégories suivantes, donnant à voir la richesse de l’expression émotionnelle humaine :
- Admiration
- Adoration
- Appréciation esthétique
- Amusement
- Colère
- Anxiété
- Émerveillement
- Malaise
- Ennui
- Calme
- Confusion
- Envie
- Dégoût
- Douleur empathique
- Intérêt étonné, intrigué
- Excitation (stimulation, montée d’adrénaline)
- Peur
- Horreur
- Intérêt
- Joie
- Nostalgie
- Soulagement
- Romance
- Tristesse
- Satisfaction
- Désir sexuel
- Surprise
Ressource
Pour enrichir ton vocabulaire émotionnel, j’ai découvert ce jeu de cartes appelé “Le langage des émotions” (pas testé cependant !).
Zoom sur les émotions positives avec Fredrickson
La théorie de la chercheuse Barbara Fredrickson met un beau coup de projecteur sur les émotions positives, qui ont souvent été éclipsées en psychologie au profit des émotions négatives et des pathologies mentales. J’ai un intérêt particulier pour la théorie de Fredrickson car elle donne envie d’apprendre à cultiver les émotions positives.
Sa théorie valorise les émotions positives que sont la joie, la fierté, l’inspiration, l’espoir ou encore la gratitude non pas seulement comme de simples récompenses passagères mais comme de véritables catalyseurs de ressources !
Selon Fredrickson, les émotions positives incitent à explorer, apprendre de nouvelles choses, à cultiver de bons liens sociaux, à développer des compétences qu’elles soient intellectuelles, sociales ou encore émotionnelles…. Prenons un exemple simple : une personne joyeuse va être plus optimiste ce qui l’incite à mettre de l’énergie dans de nouveaux projets. En outre, elle est également plus sociale et cultive des relations de qualité. Là où les émotions désagréables aboutissent généralement à un comportement plus stéréotypé (de l’agressivité dans le cas de la colère par exemple), les émotions positives ouvrent le champ des possibles : nous pensons et agissons différemment. Autrement dit, les émotions positives élargissent notre répertoire de perceptions, de pensées et d’actions.
Fredrickson montre ainsi que les émotions positives sont clés dans le processus de flexibilité psychologique, c’est-à-dire dans la capacité d’un individu à continuer de vivre peu importe le contexte et les difficultés rencontrées. En d’autres mots, apprendre à cultiver des émotions positives est clé pour notre résilience.
Je trouve sa théorie d’autant plus intéressante que je suis parfois submergée d’actualités anxiogènes sur les réseaux, qui peuvent générer de la lassitude voire un sentiment d’impuissance et de l’inertie face à l’état du monde. Il m’est donc essentiel de laisser plus de place aux émotions agréables, par exemple en décidant de m’entourer de telle ou telle personne, en faisant une détox d’actualité, etc.
Une émotion négative est-elle vraiment négative ?
Je reprends ici le terme d’émotion positive utilisé par la chercheuse.
Toutefois, je préfère parler d’émotions agréables et désagréables, car toutes les émotions ont une raison d’être et sont porteuses de sens.
Dire qu’une émotion est négative peut encourager au rejet de celle-ci, ce qui nous empêche de nous intéresser à ce qu’elle a à nous dire sur nos besoins.
Pour aller plus loin 💡
